L’ENTERREMENT DE VIE DE JEUNE FILLE DE LENA MARS. Une nouvelle de Marc Oreggia


Une courte nouvelle pour public averti dans le plus pur style de P.J. Farmer et silverberg avec un gros soupçon de Moorcock dans son cycle des danseurs de la fin des temps.
 Fascinant et dérangeant.


L’ENTERREMENT DE VIE DE JEUNE FILLE DE LENA MARS

Par Marc Oreggia


La nuit de Niujin
Est plus belle que cent jours
Que mille jours de Capriss
Oh-oh ooohh

La nuit à Niujin
Je te ferai l’amour
Mes écailles mutantes sur ta chair lisse
Oh-oh ooohh


    L’atmosphère de Vénus déverse par le panneau mural son obscurité chaude et mauve dans l’alvéole de Léna Mars, qui fait onduler son corps souple et ambré au rythme planant de l’holo.
Léna ? Tu écoutes encore ces inepties ? Tu sais que ces « musiciens » - si pour toi, ce vacarme s’appelle encore jouer de la musique - sont interdits sur Capriss, grommelle Zhao, le tuteur de matrice, dont l’image flottante et bleutée vient d’apparaître au centre de la pièce.
Les Mutants ? Bien sûr, rit Léna, en cessant ses trémoussements. Tout le monde sait que c’est interdit, mais c’est le son à la mode sur l’aéropole ! Vous perdez votre temps à me dire ça, c’est dommage. Bien, il faut vous effacer, mon cher, mon vieux Zhao. Mon cher vieux Zhao. J’ai envie d’une douche, et je serai nue dans un instant. Vous savez que j’ai dix-huit ans terriens la semaine prochaine. Je ne voudrais pas que mon tuteur de matrice soit inquiété pour un holo déplacé.
Je ne me rappelle pas t’avoir jamais vue nue, sursaute l’image de Zhao, mais enfin, je viens précisément pour cela, tes dix-huit années T, bien entendu. Je suis venu te prévenir en personne, comme la digne tradition caprissienne l’exige, que ton autorisation de sortie est active. Tu n’as qu’à te rendre dans ton centre de bloc pour l’implant oculaire.
Mon autorisation de descente…
De sortie. Evidemment, je ne peux pas t’empêcher de sacrifier à… cette dégradante coutume, s’assombrit le vieil homme. Si tu veux un conseil…
Je suis folle de tes conseils, Zhao, s’amuse Léna qui, en gestes lents, commence à retirer sa tunique.

Le vêtement glisse sur la jeune femme, révélant ses épaules, ses seins fermes et dorés, et les nombreux grains de beauté qui tracent entre eux comme une étrange constellation. La pensée de Léna lui fait entendre le bruissement de l’eau, d’une eau qui coule, lentement, dans son esprit. L’eau du ciel vénusien, recueillie, transformée par les cellules de l’aéropole, se répand alors dans l’alvéole d’ablutions voisine. L’écogenèse n’a certes pas profité à tous, sur ce monde, songe-t-elle.

Si tu veux un conseil avant que je ne te laisse te… hum, mon dernier conseil matriciel en quelque sorte, évite Niujin. C’est un endroit réellement sordide. Il y a d’autres endroits à la surface pour vos… enterrements. Végass, par exemple. Il y a les jeux terriens. Et ils ont un régulateur de cycles. Douze heures de jour, douze heures de nuit, comme ici-haut. Je te dirais volontiers de rester ici, de passer quelques jours en alvéole de recueillement et de chercher un sens à ta vie, mais je n’irais quand même pas jusque-là. Je devrais. Ce serait juste. Ce serait mon rôle. Mais enfin, amuse-toi si tu le souhaites. Cependant, Niujin… Niujin est infréquentable en pleine saison-nuit. Il y a du danger. Du danger, Léna. 
Tant qu’à descendre, la saison-nuit, c’est un peu l’intérêt de la chose, tu ne crois pas ? Et puis, ne t’inquiète pas tant, je ne descends pas seule.
Il y a du danger en bas, je te le répète. Ceux de la surface ne sont pas des bêtes de foire, ni des animaux de compagnie, encore moins des amis. Ils ont du ressentiment envers nous. Du ressentiment, Léna. Evite Niujin. C’est mon conseil.


*

Allongée sur la couche moite de son alvéole, Nox Quant regrette les cent dolluans évaporés dans le climax. La drogue n’a évidemment aucun effet sur elle. Elle aurait dû s’en douter. Après tout, elle n’est pas humaine. Débridé il y a plusieurs semaines maintenant par Lazar Ars, le chirquant du District 30, son cerveau quantique n’en reste pas moins une masse artificielle, quoique affreusement complexe et autogénérante, et sa condition de gynoïde sexuelle ne s’en est pas améliorée pour autant. Au contraire, sa conscience naissante rend par moments les choses bien plus rudes à supporter, et la drogue ne peut rien y changer. Autant garder ce qui lui reste de fric pour le plan proposé par le chir. La phase B du truc. Le transfert. Le grand saut. Sûrement une belle connerie, d’ailleurs, et au mieux, encore. Au pire, une forme de suicide. Et dans tous les cas, quelque chose de pas légal. Mais au point où elle en est.
Nox rend translucide la paroi nord de son alvéole, et observe les contours hérissés des blocs de graphène voisins, qui projetteraient de l’ombre sur les avenues encombrées, si ce n’était pas l’ombre, déjà. Elle a envie de quitter Niujin, pour l’autre côté de Vénus, celui où il fait jour, ce serait au moins ça. Elle allume une cigarette, une terrienne légère, inspire la fumée avec lenteur, espérant dans cette inhalation un soulagement qui ne vient pas.


*


Le coléoptère caprissien ralentit sa descente dans un bourdonnement de métal. Sur les holo-écrans, la mégapole dévoile peu à peu aux passagers en transit l’étendue de son grouillement, qui fait dans l’obscurité de la saison-nuit comme une pellicule lumineuse à la surface de la planète.

On reste une nuit semaine, alors ?
Ovula vient de tourner la tête, relève sa frange platine et, après un clignement comique de ses yeux immenses et étonnés, pose un baiser rapide sur l’épaule de son amie.
D’accord pour une nuit-semaine, répond Léna, pensive. On verra bien après… Nous serons de sages néocitoyennes. On fume, on danse, mais on n’est pas tenues de coucher avec n’importe lequel de ces sauvages. Et puis j’ai promis au vieux… Tiens, tu connais l’origine de l’expression, d’où ça vient, un enterrement de vie de jeune fille ?
Plus ou moins. Les terriennes tuaient leurs progénitures femelles, parce qu’elles n’avaient droit qu’à un enfant, c’était au vingtième siècle, je crois.
Léna se met soudain à rire, attirant l’attention d’un groupe de commerciaux végassiens, entités sombres et fongibles dont les regards, clignotant en lueurs verdâtres sur des défilements de chiffres, les fixent alors bizarrement.
Mais tu n’y es pas du tout ! T’avales vraiment n’importe quoi, Ovula ! L’enterrement de vie de jeune fille, c’était un genre de fête, comment expliquer… C’est en effet une vieille expression terrienne. Rien à voir avec notre délire caprissien du passage à l’âge adulte. A l’époque, là-bas, il était fréquent que les jeunes femmes se marient.
C’est dégueulasse…
Pas forcément, c’est… différent. Eh bien, avant d’entrer dans la servitude, les jeunes terriennes fêtaient l’évènement, si on peut dire, par une nuit de débauche.
De débauche… Quelle classe. Ah, un peu comme nous, alors ! rit Ovula à son tour. Finalement, tout change, mais rien ne change. J’aurais bien aimé être une terrienne. Elles sont si belles, il paraît. Tu as vu ce qu’elles portent ?
Rien de plus léger qu’ici, à mon avis, mais des tissus qui pèsent plus en dolluans, ça c’est une certitude. Et rien ne change vraiment, non. Les hommes restent toujours des hommes… et les femmes aussi ! Tiens, je crois que cette fois on arrive, j’ai vu le dôme de la Tour d’Aphrodite, on doit être pile à la verticale du District 16. On va enfin pouvoir fumer tranquille. Oh… merde…
Quoi ?
La pollution… T’as vu la pollution... ?


*


Une des anciennes leur a refilé l’adresse. Bloc 966X. Dis.16. Le Vestalia, un club à deux dolluans le verre de Kasei win - autant dire rien en monnaie de Capriss – endroit obscur perdu dans les sous-sols de l’immense tour-habitat, tente d’émerger d’un sommeil ancien au rythme languide d’un vieil holo terrien. Sur la piste, quelques danseurs à demi-nus, trempés de sueur, se croisent, se frôlent, s’étreignent déjà. L’homme, brun et nerveux, tire sur une longue bouffée de sa martienne, qu’il expire en partie au visage de Léna.
Vous, les caprissiennes, vous êtes vraiment les plus belles femmes du système, les plus élégantes. Exceptionnelles, quoi.
Un sourire, moqueur et superbe, se dessine sur les lèvres pâles et charnues d’Ovula.
Nous sommes bien conscientes de la chance que nous avons, s’amuse la jeune femme dans un rire cristallin. Mais toi, Roy – c’est bien ton nom, Roy ? – le penses-tu vraiment ? Crois-tu vraiment, qu’en-haut, nous les femmes, nous avons quelque chose d’exceptionnel ?
Le vénusien inspire lentement une nouvelle dose, son regard noir et perçant semble fouiller tous les recoins du Vestalia, avant de se replonger dans celui d’Ovula.
Ma foi… Ecoute, je vais te répondre sincèrement… pour une fois. J’imagine pas un plan cul avec une caprissienne. Et sûrement pas avec des pucelles comme vous. Note bien que je pourrais, ce serait facile, et toutes les deux vous rappelleriez toute votre vie de cette nuit et de la longueur de la queue de Roy Loscontrol. Mais non. C’est pas que je le sente pas, mais… Je suis pas pour vous. C’est pas plus compliqué que ça.
On est gravement déçues ! On est descendues pour toi, Roy, se met de nouveau à rire Ovula.
Je suis sérieux. Je me confie, là. Je suis pas comme toi. Ton monde, c’est pas le mien. Ici-bas, on subit des nuits de trois mois, on n’a pas de quoi se payer vos machines à jours-nuits. L’obscurité, la surpopulation (l’odeur, merde), la pollution, les mutations – en fait, je vous déconseille de me voir complètement à poil, même si je sais que t’en crèves d’envie – tout ça, ça nous rend dingues. J’ai pas de régulière, du coup. Enfin, si, mais c’est une putain de gynoïde de QLI, elle a un cul et des nibards synthétiques, quoi.
Classe… On connaît ça, là-haut.
Oui mais quel cul, quand même. Tout ça pour dire que les filles d’ici, les vraies je veux dire, elles sont au moins aussi branques que nous – il paraît même qu’il y en a qui voient dans le noir, depuis la saison dernière. T’imagine le truc. Non, ici, c’est la merde, la vraie bonne grosse merde vénusienne. Et pas de travail. Tu te rends pas compte de là-haut. Heureusement qu’on a le climax pour tenir.
Le climax ? coupe Léna. Qu’est-ce que c’est ?
Quoi ? Tu descends à Niujin avec ta copine, et… Me dis pas que tu connais pas le climax ? Vous avez jamais entendu parler du climax sur Capriss ?
Jamais, non.
Ben, faut que je vous présente mon vieux pote Deal, alors.



*


    Elle surgit au milieu d’une des nuits les plus noires de l’hiver-nuit de Niujin. La lumière de son corps dénudé et de son indémêlable chevelure rousse éclairent l’alvéole de la jeune femme, qui s’éveille en sursaut et étouffe un cri d’effroi. Au sol, à portée de la couche tiédie par le corps de Léna, traîne l’ampoule, vidée une heure plus tôt de son climax. Elle se souvient. La rencontre quelques segments plus tôt avec Roy, dans les sous-sols du District 16. Des corps nus. Le sien, peut-être bien. Roy les a emmenés en autolec quelques blocs plus loin. Lui, c’est Deal. Deal Perverse. Vous pouvez tout lui demander. Et il a le climax. Deal a souri de ses curieuses dents effilés, et leur a vendu du climax. Non. Pas vendu, mais donné. En échange, Ovula a bien voulu le sucer dans l’autolec assombrie. Elle, non. Allez, Léna, détends-toi un peu, bordel. On est à la surface. Roy a bien voulu la raccompagner, et elle a été étonnée qu’il n’essaie rien après l’avoir déposée au bloc. T’inquiète. Je te ramènerai ta copine un peu plus tard. Elle a avalé sa dose et s’est écroulée.

Qui… qui es-tu ? Es-tu réelle ?
Comme mû d’une vie propre, l’écheveau roux et tentaculaire paraît ondoyer au-dessus du visage de l’apparition, dont les pupilles s’élargissent soudain en immenses flaques vertes.
Je suis Vénus, Léna. Je viens à toi, à ta conscience enfin réveillée. Je viens à toi, car je t’aime.
Tu… tu es si belle.
Je suis belle, oui. Belle et dangereuse. Je suis venue te mettre en garde.
La créature approche de la couche, s’y glisse lentement, et tout en psalmodiant en une langue ancienne un chant inconnu, caresse de ses mèches vivantes et infinies, les jambes, le ventre, les seins, le sexe humide de Léna Mars.
Oui, viens, viens en moi, gémit la caprissienne en se mordant les lèvres et en saisissant un des appendices curieusement durci et visqueux.
Tu es en danger, Léna. La pureté même de ton existence te met en danger. Je suis l’esprit de ce monde, je suis ce monde, et les hommes m’ont pervertie. Fuis, Léna. Quitte-moi. Quitte-moi tant que tu le peux. Quitte-moi avant que je ne veuille te garder.


*


Ce n’est pas ce qui était convenu, coupe Nox Quant. Vous m’aviez dit un corps synthétique !
C’est que c’est extrêmement cher ! Je pense d’abord à votre intérêt, reprend le chirquant, dont le front se met à suer. Et je vous assure que c’est sans danger. Ce genre de... support sort de la morgue du district. Je connais le coroner. Certains corps ne sont jamais réclamés, et finissent en réacteur.
C’est… sordide. Dégueulasse, même. Vous pensez que je ne suis pas capable de faire la différence ! Vous m’avez-vous-même débridée le cortex, Lazar. Je suis… au moins aussi humaine que vous ! Vous savez ce que je ressens, merde.
Le vieux chirquant fait quelques pas dans son alvéole grisâtre et étouffante, éponge son front de sa manche, puis tire d’un panneau un vieux cigare terrien, qu’il tranche et allume d’un geste étonnamment précis.
C’est simplement du recyclage, Nox. C’est ainsi qu’il faut voir les choses, et il n’y a là-dedans rien d’immoral. Je dirais même, au contraire.


*

Il n’y a pas d’issue à la course des deux caprissiennes, qui s’effondrent, presque vidées d’air, dans le recoin d’un bloc, au fond d’une impasse qui fait surplomb à la voie magnétoplasmique. Il y a bien une passerelle, quelques mètres plus bas, qui enjambe la voie, mais elle est trop distante. Il suffit de sauter, et c’est la fin de ce cauchemar, se dit Léna, prise d’effroi.
Tu n’aurais jamais dû revenir me chercher, on va crever ici comme deux connes, souffle Ovula entre deux sanglots. Tout est de ma faute !
A l’autre bout de la ruelle, la silhouette de Deal Perverse s’extirpe de l’ombre, grêle et menaçante. Il tient un déchireur dans sa main droite. Il n’est pas seul, et les formes, plus pesantes, qui l’accompagnent n’ont malheureusement rien d’humain. C’est ces deux-là. Une pour vous, une pour moi, et ne me l’abimez pas, croit entendre Léna.

Les poursuivants sont à présent assez proches pour que les jeunes femmes en respirent l’odeur immonde, et distinguent malgré la touffeur de la nuit vénusienne l’atrocité des corps blêmes, l’obscénité des sexes mauves et noueux, la palpitation des vertex, ratatinés par la mutation, qui surmontent les visages ravagés de bubons.
Fais comme moi, fais comme moi ! hurle une dernière fois Ovula.
La caprissienne prend un envol désespéré, mais son élan est trop court pour atteindre la passerelle. Elle ne fait que la toucher des mains, avec une force suffisante toutefois pour que son corps se mette à tournoyer avant de s’écraser en contrebas, sa tête la première, qui éclate sous le choc.
La conscience d’Ovula, qui traîne encore sur la voie en un conglomérat indécent de glaires rosâtres et d’éclisses d’os sanglantes, hésite un peu, avant que le tube magnétoplasmique qui relie les districts 15 et 16, lancé à pleine vitesse, n’en efface enfin toute trace.

La nuit de Niujin
Va te jouer des tours
Noire et dévastatrice
Oh-oh ooohh

La nuit sur Niujin
Prends garde aux carrefours
Et à tes orifices
Oh-oh oooh


*


Mais vous êtes cons ou quoi ? Elle est vivante ! hurle Lazar Ars.
Je… je vous assure que non, bredouille Deal, on vient de lâcher mille dolluans à la morgue.
Espèce de taré ! Je vais te tuer, tu m’entends, je vais te tuer !
Elle était morte. Je l’ai vue. Mais putain, vous devriez arrêter ce truc, maintenant…
Le corps de Léna Mars, que retiennent à grand peine quatre courroies aux nouures usées jusqu’à la trame, soubresaute violemment sur le transplantoir. Un frisson de mort grenèle étrangement sa peau nue et camphrée. Ses yeux se révulsent atrocement et un filet de sang bulleux dégouline de sa bouche grande ouverte. Le chirquant tente d’interrompre le transfert en gestes maladroits, mais il est trop tard à présent. La machine a achevé de scanner le cerveau quantique de Nox Quant, dont l’enveloppe corporelle, désactivée, git sur la table d’opération d’à côté. La conscience artificielle de la gynoïde est en voyage entre les deux corps nus, et briser le processus la tuerait. Ce n’est sûrement pas ce qu’elle souhaite. Merde. C’est elle la cliente, après tout.


*


Entraînée par la foule des passagers qui s’étire lentement du coléoptère en un long cordon organique, Léna se demande si elle n’a pas rêvé cette longue nuit à la surface. Des images d’une irréalité violente et putride se recomposent dans l’esprit encore embrumé de la jeune caprissienne.
Non. Non, je n’ai pas rêvé. Je n’ai pas rêvé. Je suis partie avec Ovula, et je reviens sans elle. Ovula n’est plus là. Ovula est morte, dévorée par la nuit du dessous.
Des spasmes d’angoisse et de terreur la soulèvent brutalement, et des larmes noient ses joues sans qu’elle ne s’en rende immédiatement compte. L’androïde qui la suit de près dans l’interminable file des voyageurs la saisit d’une main ferme par son épaule nue.
Tout va bien, Mademoiselle ? Désirez-vous que je vous conduise à un médibloc ?
Non… non, ça ira, merci. Je suis fatiguée, c’est tout. Très fatiguée, mais ça ira.
Léna se reprend alors, parvient à faire les quelques pas qui lui manquent avant le grand hall, puis s’assied à la terrasse de l’Earth-bar. Elle n’a pas rêvé, bien qu’elle reconnaisse à présent les lieux, lumineux et presque déjà familiers, de l’astroport de Capriss, certains visages, aussi, et que ces éléments connus entraînent dans sa pensée comme une irruption de réalité qui la rassure.
Mais elle n’a pas rêvé, parce qu’Ovula est morte.
Elle n’a pas rêvé, parce qu’elle entend la voix dans sa tête. Elle se souvient. Elle s’est réveillée dans une alvéole inconnue. Les marques de ses entraves bleuissaient ses membres douloureux. Un esprit, une conscience qui n’était pas la sienne, cherchait à prendre possession de son corps. Cela a duré de longs segments, avant que l’autre, épuisée autant qu’elle-même, ne renonce. Je suis aussi effrayée que toi par la situation. Je ne peux quitter ton corps.
Léna a englouti les somnifères. A son réveil, Léna/Nox s’est traînée vers l’astroport de Niujin, dans le but de quitter la surface par la première navette.
Léna/Nox quitte sa table de l’Earth-bar, déjà occupée par un couple de voyageurs. C’est déjà l’aube artificielle. Elle marche vers la porte principale de l’astroport, qui ouvre sur le centre plein de vie et de couleurs de la cité flottante.

Toute cette lumière…
Tu… tu es là. Tu es encore là.
Oui. Je suis avec toi, maintenant, Léna. Je serai toujours avec toi. Je vivrai par toi. Mais ne t’inquiète pas, Léna.

Ne t’inquiète pas.

Je ne suis qu’amour.


*


La nuit de Niujin
Est plus belle que cent jours
Que mille jours de Capriss
Oh-oh ooohh

La nuit de Niujin
Durera toujours
Chaude et consolatrice
Oh-oh ooohh


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